Chaque fille a déjà un mari dans la famille de son père. "Pour conserver la souche de la famille

Bandundu : le mariage consanguin recule
RD Congo Badylon Kawanda
Les jeunes filles du Bandundu, proche de Kinshasa, refusent de plus en plus souvent de se marier à un homme de la famille de leur père comme le veut la coutume. Certains parents préfèrent aussi maintenant "vendre" leurs filles à meilleur prix…"Beto zolaka ve kukanga chance ya mwana ne beto (Nous n’avons pas voulu empêcher notre fille de saisir sa chance)" ", explique en kikongo mâtiné de français, Modeste Mpenteng, entouré des vieux sages de sa famille. Ce père de famille tenait ce discours à Kikwit, ville commerçante de la province de Bandundu à environ 500 km de Kinshasa, lors du versement de la dot pour le mariage de sa fille. Le prétendant n’était pas de la famille de Modeste, dont la coutume veut pourtant que l’on donne à une fille un mari dans la famille du père. Cette pratique, appelée Kitchuil commence, en effet, à être abandonnée par certains parents des tribus Yansi, Mbala et Ambun de la province qui respectaient jusque-là scrupuleusement cette vieille tradition. Basée sur un principe appelé Ekwoon (système bananier) ou Muking alél ibà (la liane inséparable du palmier), cette coutume prône le raffermissement des relations familiales. Suivant cette tradition, chaque fille a déjà un mari dans la famille de son père. "Pour conserver la souche de la famille…", explique Benjamin Bitabor Luzingu, un sage yansi. Selon les croyances ancestrales, ceux qui s’opposent à cette forme de mariage encourent des risques : stérilité, mort, myopie et autres malédictions. "Ma fille avait refusé cette histoire et depuis, elle ne met plus jamais au monde", avoue Pombo Marie, une habitante de Kikwit. Mais ils oublient de dire que ces mariages consanguins sont aussi risqués que les enfants qui en sont issus peuvent avoir des malformations génétiques.Les filles se libèrentAvec le temps, cependant, cette coutume tombe peu à peu en désuétude. Les filles qui ont été à l’école et qui vivent en milieu urbain la rejettent vigoureusement. "C’est dégradant et dépassé, ce système-là. Je suis libre de choisir mon partenaire conjugal", soutient Chantal Mutshumalala, une diplômée en sciences infirmières et hospitalières, qui a refusé fermement le mari que lui proposaient ses parents. Ne pouvant l’y contraindre, ces derniers ont dû rembourser la petite dot qu’ils avaient déjà perçue de son prétendant. La révolte des filles est d’autant plus vigoureuse que les hommes qu’on leur donne en mariage ne répondent pas toujours à leurs attentes. "Celui qu’on m’a proposé n’était pas de mon goût et était très avancé en âge", fulmine Ester Tabala, 29 ans, qui a dû, elle aussi, dire fermement non à ses parents. Les hommes aussi regimbent. Enseignant à l’Institut Way-Way de Kikwit, Lily Mumba a notamment divorcé d’avec son épouse, une Kitchuil comme on les appelle couramment. "Elle me manquait du respect, au motif que je l’avais eue gratuitement…", explique-t-il. Même certains parents ne veulent plus de ce mariage familial, car la dot versée lors de ce type de mariage est souvent symbolique.

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