lundi 5 mai 2008

Chaque fille a déjà un mari dans la famille de son père. "Pour conserver la souche de la famille

Kobala muana ngashi eza malamo mbala mosusu mpo au lieu bandeko ya famili batula bakozua mobali mpe boyebani bizaleli na kati ya famili. Bana basi bakomi kosala mutu makasi, bakomi koboya libala na kati ya famille. Coutume eza eloko ya kosakana n'ango te.

Bandundu : le mariage consanguin recule

RD Congo
Badylon Kawanda

Les jeunes filles du Bandundu, proche de Kinshasa, refusent de plus en plus souvent de se marier à un homme de la famille de leur père comme le veut la coutume. Certains parents préfèrent aussi maintenant "vendre" leurs filles à meilleur prix…"Beto zolaka ve kukanga chance ya mwana ne beto (Nous n’avons pas voulu empêcher notre fille de saisir sa chance)" ", explique en kikongo mâtiné de français, Modeste Mpenteng, entouré des vieux sages de sa famille. Ce père de famille tenait ce discours à Kikwit, ville commerçante de la province de Bandundu à environ 500 km de Kinshasa, lors du versement de la dot pour le mariage de sa fille. Le prétendant n’était pas de la famille de Modeste, dont la coutume veut pourtant que l’on donne à une fille un mari dans la famille du père. Cette pratique, appelée Kitchuil commence, en effet, à être abandonnée par certains parents des tribus Yansi, Mbala et Ambun de la province qui respectaient jusque-là scrupuleusement cette vieille tradition. Basée sur un principe appelé Ekwoon (système bananier) ou Muking alél ibà (la liane inséparable du palmier), cette coutume prône le raffermissement des relations familiales. Suivant cette tradition, chaque fille a déjà un mari dans la famille de son père. "Pour conserver la souche de la famille…", explique Benjamin Bitabor Luzingu, un sage yansi. Selon les croyances ancestrales, ceux qui s’opposent à cette forme de mariage encourent des risques : stérilité, mort, myopie et autres malédictions. "Ma fille avait refusé cette histoire et depuis, elle ne met plus jamais au monde", avoue Pombo Marie, une habitante de Kikwit. Mais ils oublient de dire que ces mariages consanguins sont aussi risqués que les enfants qui en sont issus peuvent avoir des malformations génétiques.Les filles se libèrentAvec le temps, cependant, cette coutume tombe peu à peu en désuétude. Les filles qui ont été à l’école et qui vivent en milieu urbain la rejettent vigoureusement. "C’est dégradant et dépassé, ce système-là. Je suis libre de choisir mon partenaire conjugal", soutient Chantal Mutshumalala, une diplômée en sciences infirmières et hospitalières, qui a refusé fermement le mari que lui proposaient ses parents. Ne pouvant l’y contraindre, ces derniers ont dû rembourser la petite dot qu’ils avaient déjà perçue de son prétendant. La révolte des filles est d’autant plus vigoureuse que les hommes qu’on leur donne en mariage ne répondent pas toujours à leurs attentes. "Celui qu’on m’a proposé n’était pas de mon goût et était très avancé en âge", fulmine Ester Tabala, 29 ans, qui a dû, elle aussi, dire fermement non à ses parents. Les hommes aussi regimbent. Enseignant à l’Institut Way-Way de Kikwit, Lily Mumba a notamment divorcé d’avec son épouse, une Kitchuil comme on les appelle couramment. "Elle me manquait du respect, au motif que je l’avais eue gratuitement…", explique-t-il. Même certains parents ne veulent plus de ce mariage familial, car la dot versée lors de ce type de mariage est souvent symbolique. Appelée Buluum, elle est généralement constituée de cinq litres de vin de palme et d’un peu d’argent (un dollar américain). Mais aujourd’hui, avec l’évolution de la société, les filles sont de plus en plus considérées comme une richesse pour leurs familles. La dot exigée à la famille du mari dépasse parfois les 1000 $ en ville. "Je n’avais rien gagné lorsque ma fille était donnée en mariage comme Kitchuil et je veux que ce système disparaisse. Que les parlementaires adoptent une loi dans ce sens", tempête Jean-Pierre Nsangate, un père de famille de 49 ans. Une forme de violence sexuelleMême si, à l’état-civil, ce mariage consanguin est enregistré sans problème, Géraldine Mazina du Centre culturel Mwinda de Kikwit, l’assimile à l’inceste. "Pourquoi les gens d’une même famille doivent-ils se marier entre eux ? ", interroge-t-elle, claquant les mains en signe de désapprobation. Elle pense qu’avec le brassage de cultures, "ces histoires doivent changer."Activiste des Droits de l’homme, Me Valentin Mbalanda se dit "choqué" par cette coutume. "C’est une violence faite à la femme, car ce genre de mariage est souvent forcé et précoce", affirme-t-il. Il précise que cette tradition va à l’encontre de la nouvelle loi de 2006, qui considère le mariage forcé comme une forme de violence sexuelle. Selon cette loi, l’auteur d’un tel acte encourt une peine allant de 1 à 12 ans de servitude pénale, et est contraint de payer une amende d’au moins 100 000 Fc (environ 200 $). Mais "vendre" les filles à celui qui apporte une grosse dot plutôt que l'offrir gratuitement à un membre de sa famille est une autre forme d'aliénation des femmes…