La population du Kivu se REVEILLE
A Monsieur Joseph KABILA KABANGE
Président de la République démocratique du Congo
C/o Ambassade de la RDC en Belgique
Rue Marie de Bourgogne, 30
1000 Bruxelles
Monsieur le Président,
L’asbl SIMA-KIVU, association de droit belge oeuvrant en faveur du développement du Nord-Kivu, du Sud-Kivu et du Maniema, souhaite vous exprimer, sous forme de lettre ouverte, sa vive préoccupation face à la dégradation continue de la situation sécuritaire des populations du Kivu.
Ces populations, mûries par l’expérience douloureuse de la guerre et par les promesses faites par vos collaborateurs et vous-même, ont clairement voté pour la paix en vous élisant massivement lors des élections présidentielles de 2006. Mais quelle n’a pas été leur déception lorsqu'en janvier 2007, elles ont appris que les autorités politiques et militaires congolaises négociaient - au Rwanda, pays à la base de la guerre qui ravage la RDCongo depuis 1996 -, avec le général Laurent Nkunda, l'un des plus grands criminels que compte le Congo !
Ce chef de milice terrifie l'est de la RDC depuis plusieurs années : plus de 200 victimes à Kisangani en mai 2002, des dizaines de morts à Bukavu en mai-juin 2004, plus de 140 morts à Sake en novembre 2006…
Il se trouve sous le coup d'un mandat d'arrêt international lancé contre lui par votre gouvernement en septembre 2005. Et cela, pour crimes de guerre, crimes contre l'humanité et insurrection.
Chacun se souvient que lors de votre visite à Sake le 1er décembre 2006, Monsieur Vital Kamerhe, président de l’Assemblée Nationale et chef du PPRD, avait déclaré : « Le président est venu dire à la population du Nord-Kivu qu'il n'y aura pas de négociation avec Nkunda. Il doit se ranger, ou on le frappe ». Il confirmait ainsi les déclarations du ministre de l'Intérieur, le général Numbi, qui affirmait deux jours plus tôt que "Laurent Nkunda est considéré comme un criminel, tant international que national. Le gouvernement ne doit pas négocier avec Laurent Nkunda. Le Gouvernement vient avec un ultimatum. On lui demande : un, de cesser avec des hostilités. Deux, de replier ses hommes. Trois, de les mettre à la disposition du gouvernement pour le brassage..." . Double langage, car en dépit de ces discours, le ministre engagea peu après des négociations avec Nkunda, sans que n’ait été levé le mandat d’arrêt pris à son encontre.
Plus inquiétant encore : le général insurgé a posé ses conditions qui toutes ont été acceptées par vos émissaires. On pouvait s’y attendre, cette attitude a accru le sentiment d'impunité chez d’autres chefs de milices qui terrifient les populations. Le signal a bien été capté au Sud-Kivu : quelques jours après la fin des négociations avec Nkunda - le 30 janvier dernier -, le major Michel Rukunda, à la tête d’anciens soldats du RCD-Goma, a attaqué Minembwe. Et votre gouvernement n’a rien trouvé d’autre que de négocier.
Plus grave encore, le colonel Eric Ruhorimbere, les lieutenants- colonels Kibibi et Biyoyo, le major Elias, ainsi que d’anciens insurgés ayant combattu en mai-juin 2004 sous les ordres du colonel Jules Mutebusi ont été interceptés à Bukavu le 27 février dernier. Au lieu de les arrêter, le général Sylvain Tshikwej, commandant de la 10e région militaire, les a renvoyés vers la 8e région militaire, au Nord-Kivu. Et quelques jours plus tard, on les a retrouvés à Minembwe, libres !
Comment comprendre, Monsieur le Président, une telle bienveillance envers des criminels qui menacent gravement la sécurité de la République ? Elle tranche avec l’attitude du gouvernement envers des citoyens congolais exprimant des opinions divergentes, tels le Pasteur Kuthino Fernando et Madame Marie-Thérèse Nlandu emprisonnés depuis plusieurs mois, et plus récemment les habitants du Bas-Congo massacrés impunément par les forces de l’ordre.
Par ailleurs, les récents événements survenus à Kahemba au Bandundu, où l’armée angolaise a violé la souveraineté congolaise sans provoquer de riposte appropriée, ont confirmé le laxisme de votre gouvernement. Cette apathie n’est pas de nature à apaiser les craintes des Congolais qui voient des régions de la RDC s’installer durablement dans l’instabilité. Des informations récentes et inquiétantes en provenance de l’est du pays font craindre l’imminence d’une nouvelle guerre. Les déclarations et discours ne masquent-ils pas une stratégie consistant à sacrifier le Bandundu aux intérêts angolais et le Kivu à ceux du Rwanda ?
Vous le savez, les enjeux territoriaux et miniers constituent la cause principale des guerres subies par notre peuple depuis 1996. Mobiliser tous les moyens humains, matériels et stratégiques du Congo pour enrayer cette lente et continuelle désintégration du pays, n’est-ce pas votre responsabilité devant l’histoire, Monsieur le Président ?
Nous vous prions de croire, Monsieur le Président, en l’expression de notre haute considération.
Pour l’asbl SIMA-KIVU,
Elie Nkulwe, Président
Serge Munane Bintu, Secrétaire administrateur
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